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Actualités 2025

Immoporn : quand les émissions et séries immo freinent les projets d’achat

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Nelly
Rédigé le 4 avril 2025
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Depuis plusieurs années, les émissions, séries et influenceurs immobiliers envahissent nos écrans et nos fils d’actualité, nous plongeant dans un univers de luxe et de réussite. Alors jeunes (et des moins jeunes) finissent par développer une fascination qui pourrait risquer de compliquer leur passage à l’achat... Entre aspirations élevées et réalité du marché, comment ces contenus impactent les projets immo des nouvelles générations ? Décryptage.

Cheveux brushés, pantalon en lin, lunettes de soleil et talons Louboutin… Ils déambulent, sourire aux lèvres, sur des terrasses avec vue imprenable sur la Tour Eiffel. De qui parle-t-on ? Des agents immobiliers de nos séries préférées bien sûr ! De l’Agence, Buying London, Million Dollar Beach House, Buying New York, Recherche Appartement ou Maison, aux influenceurs du secteur sur Instagram comme Julia Douarin, le Club immobilier ou Sandra Viricel... Ces stars de l’immobilier, qui rassemblent des milliers de followers, font indéniablement rêver les jeunes.

Pourtant, une étude récente menée par la Sofiap (filiale de la Banque Postale) et la SNCF, en collaboration avec Ipsos, révèle que 62 % des jeunes acheteurs considèrent l'acquisition d'un logement comme une opération périlleuse. De quoi s’interroger sur l’influence de ces émissions et des influenceurs qui vendent du rêve sur un marché de l’immobilier loin d’être accessible à tous. Au point de freiner les jeunes à franchir le pas ? Cet immoporn compulsif serait-il en partie responsable de cette inertie ? On décrypte le phénomène avec Charline Schmerber, psychothérapeute et autrice de Petit guide de survie pour éco-anxieux (ed. Philippe Rey).

Immoporn, ça veut dire quoi ?
Après la tendance food porn qui consiste à se repaître de contenus 2.0 (photos, vidéos, émissions de tv) d’assiettes toutes plus alléchantes les unes que les autres, l’immo porn désigne une nouvelle pratique de consommation compulsive de petites annonces immobilières… dans le seul but de se faire rêver !

Comportements addictifs

X, Y, Z… Chaque génération affronte ses propres défis et évolutions sociétales, et le secteur de l’immobilier n’échappe pas à cette dynamique. Ainsi, une étude récente (Redfin via Insider, 2023) pointait qu’environ 12 % des jeunes de la génération Z - née entre la fin des années 90 et le début des années 2010 - estiment ne jamais pouvoir devenir propriétaires. Privilégiant mobilité et expériences, ils optent souvent pour des solutions locatives ou alternatives, le tout en s’inspirant des contenus sur les réseaux sociaux.

Face à ce constat, serait-il pertinent de faire un lien entre cet attentisme face à l’achat immobilier et l’engouement pour les séries immobilières et autres influenceurs du secteur sur Instagram ? Autrement dit, à force de rêver devant ces contenus, les jeunes hésitent-ils davantage à passer à l’action dans la réalité ?

Pour Kevin Marie, co-fondateur de CAKM Conseil et expert de l’immobilier depuis près de 15 ans, ce lien de causalité n’est pas si farfelu. « Il y a un vrai phénomène générationnel derrière le succès de ces émissions : les jeunes s’identifient à ces programmes, notamment sous l’influence des réseaux sociaux et des célébrités. On retrouve ici une dynamique hormonale et dopaminergique : ces émissions jouent sur le besoin fondamental de se loger (cf. la pyramide de Maslow) tout en offrant un miroir fantasmé de la réussite. »
La pyramide de Maslow, késaco ?
La pyramide de Maslow classe les besoins humains en cinq niveaux : physiologiques (manger, dormir), sécurité (logement, emploi), appartenance (relations sociales), estime (reconnaissance, confiance) et accomplissement (réalisation de soi). On doit généralement satisfaire les besoins inférieurs avant d’atteindre les niveaux supérieurs.

Un décryptage validé par Charline Schmerber, psychothérapeute. « Le visionnage compulsif de séries active le circuit de la récompense en libérant de la dopamine, entretenant ainsi une forme de dépendance, à l’image de l’alcool ou d’autres substances addictives. Plus on regarde, plus on en veut, mais cela ne pousse pas forcément à l’action. Ainsi, des émissions sur l’achat immobilier peuvent fasciner, sans pour autant inciter à passer à l’acte. Elles créent un produit addictif qui capte l’attention, mais n’encouragent pas à se projeter concrètement dans un projet personnel. »

Lola, 29 ans, se reconnaît dans cette description. La jeune femme, architecte, cherche depuis plusieurs années le “bon” moment pour passer à l’acte concernant son projet d’achat immobilier. « Je regarde des comptes Insta sur l’immobilier au moins une fois par jour. Ça me fait rêver et ça stimule aussi mon esprit critique. Je me dis que si j’étais eux, je ferais comme-ci ou comme ça… Mais au final, je n’arrive pas à passer à l’action : à force de regarder des biens d’exception, je suis devenue hyper exigeante. Quand je visite, rien ne me convient. »
Pour aller plus loin
[Ils sont enfin en âge d’investir](/investissement-locatif/investissement-immobilier/age-investir-immobilier/ et contre toute attente, ils ont eux aussi des rêves immobiliers plein la tête. Souvent dépeints comme désorientés, difficiles à gérer ou instables, les jeunes de la génération Z partageraient pourtant les mêmes aspirations que les générations qui les ont précédés. Mais qu’est-ce qui les anime dans ce choix de vie standardisé ? En quoi ce modèle de vie traditionnel les attire ? On fait le point.

Rêve vs réalité ?

Au-delà de l'exigence exacerbée que ces émissions et contenus 2.0 font naître, l’inaction ne serait-elle pas aussi une manière d’éviter l’engagement ? Phénomène du “quiet quitting” au travail, du “ghosting” dans les relations amoureuses… L’achat immobilier est-il aussi en train de se faire gentiment larguer par les jeunes ?

Kevin Marie confirme : « Les études s’allongent, les carrières se diversifient, la mobilité professionnelle et sociale est devenue une norme. Les jeunes veulent voyager, explorer le monde avant de se poser. Le projet d’achat est donc constamment repoussé, d’autant plus que la conjoncture immobilière, depuis le Covid, s’est fortement déréglée. Avec des taux d’emprunt dépassant les 4 % l’an dernier, le marché s’est complexifié. Ajoutons à cela une évolution profonde des aspirations de vie : le schéma traditionnel “métro, boulot, dodo” ne fait plus rêver, tout comme l’idée de fonder une famille. »
A quel âge devient-on proprio ?
L’âge médian pour devenir propriétaire se situe à 32 ans. En savoir plus.
Pour notre experte, cette hésitation s’explique aussi par une difficulté plus globale à se projeter dans un monde de plus en plus complexe « L’avenir paraît incertain, entre tensions géopolitiques, crises économiques et conditions de vie qui se durcissent. Cette génération évolue dans un climat anxiogène où il est plus facile de s’imaginer parachuté dans la vie de quelqu’un d’autre, plutôt que de construire un plan concret pour son propre avenir. J’ai des patients qui me disent par exemple : “Je rêve d’aller à New York mais je n’y vais pas parce que l’image géniale que je m’en fais pourrait me décevoir et je perdrais ainsi mon rêve.” Au quotidien, je constate qu’il y a de plus en plus de jeunes qui ont à cœur de préserver leur idéal plutôt que de le confronter au réel et risquer une déception. »

Pour Lola, la peur financière est aussi un frein « Je réfléchis trop à l’avenir et j’ai peur de me tromper. Aujourd’hui, les conditions professionnelles sont tellement mouvantes que tout peut s’arrêter du jour au lendemain. Comment être sereine pour acheter un bien immobilier ? Alors, je préfère regarder les contenus, même si je sais que c’est inaccessible, au moins ça n’est pas flippant… »

L’immobilier, une réponse sécurisante dans un monde en mutation

Malgré l'influence des émissions immobilières et la fascination pour des projets parfois inaccessibles, l'investissement immobilier demeure une opportunité solide pour les jeunes générations. Pour Kevin Marie, « Les jeunes bénéficient d'atouts indéniables : leur potentiel d'évolution professionnelle et leur adaptabilité aux mutations du marché sont des arguments forts auprès des établissements financiers. »

Outre cette attractivité forte, l’investissement dans un bien en résidence principale ou secondaire permet de mobiliser l'effet de levier bancaire sans avoir à engager une grosse somme d'argent personnelle. « Que ce soit pour sécuriser un foyer en résidence principale ou pour diversifier son patrimoine via l'investissement locatif, l'accès au crédit permet de générer un cash-flow (flux de trésorerie) positif et d'accroître son patrimoine sur le long terme. De plus, face à un marché locatif en tension et des prix en constante hausse, devenir propriétaire pourrait bientôt se révéler plus avantageux que de louer… », conclut l’expert en investissement immobilier.
Principe de réalité vs télé-réalité

Si les jeunes pensent que l’achat immobilier est plus dur aujourd’hui, ce n’est pas seulement une vue de l’esprit : la hausse significative des prix de l’immobilier au cours de ces deux dernières décennies n’y est pas pour rien ! Pour preuve, selon un sondage Ipsos pour la Sofiap réalisé en 2024, 30 % des travailleurs de moins de 35 ans estiment ne pas être en mesure d’acheter un bien immobilier dans les délais qu’ils se sont fixés.

En cause ? Des prix de plus en plus élevés (cf. une étude menée par Meilleurs Agents qui révèle qu’en 20 ans, les jeunes actifs ont perdu environ 35 % de leur pouvoir d’achat immobilier), la hausse des taux d’intérêt, et la difficulté à obtenir un prêt pour se constituer un apport personnel. Les influenceurs et autres stars du secteur immo ne sont (évidemment) pas les seuls responsables de cet attentisme chez les jeunes générations !

Consulter des comptes immo pour s’inspirer et se projeter, c’est bien, mais passer à l’action IRL c’est mieux ! Pour éviter de rester dans le fantasme et l’idéalisation, chez Pretto on aurait tendance à vous conseiller de vous confronter à la réalité du terrain : visites de biens, comparaison, info sur votre financement… Agir pour demain, c’est maintenant !

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